Le mouvement altermondialiste latino-américain Auteurs de la fiche : Léa DROUILHAT et Elisabeth TAN.
I. Racines et enjeux du mouvement alter-mondialiste
Depuis janvier 2001, le point d’orgue annuel se joue à Porto Alegre parallèlement à la rencontre du Forum économique mondial de Davos - concurrence symbolique, sachant que ce dernier réunit depuis trente an un millier de chefs d’entreprise, experts et chefs de gouvernement pour des négociations commerciales.
La question a donc été de savoir pourquoi et comment les militants du monde entier ont choisi la ville de Porto Alegre pour organiser ces forum sociaux mondiaux, et donc pourquoi ces espaces de dialogue, de convergence se situent en Amérique latine. Il sera alors intéressant de suivre le récit de Bernard Cassen, Chico Whitaker et Oded Grajew pour comprendre comment ils en sont venus à créer ces forums sociaux mondiaux. Dans une seconde partie, nous tenterons de comprendre l’influence du mouvement zapatiste dans la mouvance altermondialiste, puis de l’altermondialisme sur les politiques de deux Etats Sud Américain : au Brésil et au Venezuela. Enfin nous terminerons par les défis futurs que le mouvement altermondialiste aura à affronter.
A. Historique des luttes conçues comme anti-impérialistes et anti-libérale en Amérique Latine
Fréderic Lorca, dans l’Atlas alternatif, propose de remonter à la Genèse des résistances anti-impérialistes et néo-libérales pour expliquer le dynamisme contestataire sur le sous continent américain.
Nous nous situons dans les années 1990, en pleine hégémonie de la mondialisation du capital, de l’influence des Etats Unis et du modèle néolibéral triomphant de l’URSS. Cette période, en Amérique Latine se traduit par des modifications importantes des conditions de vie des Latino Américains à travers, notamment, la privatisation des entreprises publiques et la vente des principales richesses nationales.
A cette même époque, on assiste, sur le continent Sud Américain, à un affaiblissement des organisations du mouvement populaire, des syndicats ouvriers, des ligues de paysans, etc. Cette modification des champs de lutte se traduit également par un fort exode rural à cette époque. Aussi les années 1990 vont voir les mouvements sociaux et contestataires changer d’orientation et ceci entraînera la recomposition des mouvements sociaux.
Nous pouvons alors citer une série de phénomènes que nous aurions pu qualifier d’épiphénomènes mais qui ont en fait profondément modifié la structure des luttes sociales en Amérique Latine.
Le premier événement que nous retiendrons ici est « le Caracazo » en 1989 au Venezuela. C’est la première explosion populaire contre le néolibéralisme promu par le FMI. Ces émeutes violentes ont pour fondements la crise économique que traversait le Venezuela depuis le début des années 1980 et les privatisations massives lancées par son président, privatisations qui paralysaient la population même si elles satisfaisaient le FMI.
Le soulèvement des indiens en Equateur en 1990 et la marche des peuples indigènes en Bolivie en 1990 marquent également, le retour (ou l’arrivée) des indiens sur la scène politique, mais elles sont aussi le signe que les nouveaux acteurs sociaux, armés de propositions nouvelles, venaient reconfigurer la carte politique. Elles sont en outre, pour les consciences populaires, significatives du fait que ceux qu’on considérait comme de « petits peuples » peuvent accomplir de grandes mobilisations.
Notons finalement la campagne continentale à l’occasion de la Résistance indigène, noire et populaire de 1992 qui est, comme son nom l’indique, à l’échelle continentale ; les révoltes zapatistes et des Sans terres au Mexique et au Brésil dés le début des années 1990 ou encore l’élection, en 1998, de Hugo Chavez, qui, pour les militants du monde entier, signe l’accession de Caracas comme capitale du militantisme.
Plus largement, c’est l’Amérique Latine qui revêt le statut de leader dans l’organisation des mouvements altermondialistes comme en témoignent les forums sociaux mondiaux qui y seront organisés.